La Constitution est-elle un texte sacré dont il est interdit d’amender le moindre article même si ceux qui l’ont élaborée conviennent qu’il est urgent, vital voire salutaire d’introduire un changement même formel sur le texte en question, en réponse aux exigences imposées par la conjoncture que le pays traverse ?
Autrement dit, dans les régimes démocratiques, où la gestion des affaires de la cité participe de la volonté du peuple, est-il encore acceptable qu’un texte rédigé par des humains en fonction de leurs intérêts devienne, par la décision d’autres humains, un texte relevant du sacré qu’on ne peut approcher ni de près ni de loin et à n’importe quel prix ?
Dans la Tunisie post-révolution et post-25 juillet 2021, la question relative à l’amendement de certains chapitres de la Constitution de 2014, considérés comme incitant à la division, voire à la discorde entre les Tunisiens, s’est posée, ces derniers mois, avec insistance, opposant deux clans convaincus qu’ils ne peuvent jamais s’entendre.
Sauf qu’avec l’évolution quotidienne de la situation politique et l’avènement d’une nouvelle approche militant pour faire du dialogue l’unique mécanisme de résolution des problèmes et des désaccords quelles que soient leur ampleur et leur acuité, on est parvenu, enfin, au fait que l’intérêt général commande de surmonter les querelles idéologiques et de trouver un point de rencontre qui rassemble les adversaires et les oblige à s’entendre sur l’essentiel.
Ainsi, la Constitution a beau préserver sa dimension d’un texte sacré, elle demeure sujette à la modification de certaines de ses dispositions dans l’objectif commun d’améliorer son contenu.
Et si l’idée est acceptable et même séduisante pour la noblesse de l’objectif dont elle vise la réalisation, restent posées les grandes questions de savoir qui va piloter cette opération amendement-perfection, quels objectifs cherche-t-on à atteindre, et l’interrogation la plus importante est la suivante : la nouvelle Constitution ambitionnée obéira-t-elle dans son élaboration à une approche participative, c’est-à-dire sera-t-elle la synthèse commune des apports de tous ou une copie rédigée unilatéralement, fruit d’une commission dont on ne connaîtra même pas les membres ?